Qu’est-ce que l’écologie du livre ?


L’écologie du livre est une invitation à penser les mondes du livre comme un écosystème.
Son objectif est de construire de nouvelles perspectives communes sur les interdépendances entre les différents maillons de la chaîne.


En prenant la question du livre par ses multiples usages — ce qu’on peut donc appeler ici une « écologie des usages » —, nous souhaitons ouvrir la porte à un questionnement transversal sur les manières de faire, les modes de fonctionnement et les pratiques, avec l’ensemble des acteurs et actrices du livre.

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1. ÉCOLOGIE MATÉRIELLE

Le livre est un objet manufacturé.

En cela, il a une matérialité (du papier, de l’encre, une reliure) sur laquelle il est important de se questionner : comment est-il produit ? D’où viennent les matières premières ? Quels sont les trajets de ses différents composants ? etc.

Cette écologie matérielle du livre, invite à interroger la soutenabilité de chaque production.

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2. ÉCOLOGIE SOCIALE

Le livre est une œuvre.

En cela, il implique la participation de plusieurs actes de création — dont les particularités et complémentarités méritent d’être analysées : un auteur, un éditeur, un maquettiste, un imprimeur et un libraire. Ainsi, si le livre peut être vendu, il n’est assurément pas une marchandise comme les autres.

Il est primordial, pour assurer la qualité de cette création, de veiller à ce que l’ensemble des relations et liens entre les divers acteurs soient sains, viables et réciproques. Cette seconde dimension invite donc à questionner les interdépendances et les équilibres au sein de la chaîne du livre.

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3. ÉCOLOGIE SYMBOLIQUE

Le livre, enfin, est un véhicule.

En cela, il a une vie qui dépasse l’ensemble des acteurs de la chaîne du livre : celle que lui donne un lecteur ou une lectrice. En effet, le livre est un support pour transmettre des savoirs, des idées et des imaginaires. A ce titre, le livre convoque autour de lui de nombreux autres acteurs (sociaux, éducatifs, culturels, politiques, etc.), ce qui entraîne une vraie exigence à s’interroger sur la qualité, la diversité et l’évolution des usages des lecteurs et des lectrices.

Le concept de bibliodiversité, diversité culturelle appliquée au monde du livre (en écho à la biodiversité), entre en relation directe avec ce troisième aspect de la question écologique du livre. En effet, il est également nécessaire de penser la diversité qualitative des productions mises à la disposition des lecteurs et lectrices dans un environnement donné, car celle-ci conditionne les représentations disponibles pour chaque société — et recoupe, de fait, de multiples dominations croisées*.

Objet de haute-nécessité, le livre est un indéniable outil d’imagination et d’émancipation dont la grande diversité doit être soutenue et préservée.

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* Le terme « bibliodiversité » fait référence à un ensemble de publications variées dans le paysage éditorial, représentatives d’un système culturel équilibré où toutes les voix peuvent s’exprimer. Voir Susan HAWTHORNE, Bibliodiversité, ECLM, 2016 (à consulter ici).

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CONCLUSION

Ces trois dimensions (matérielle, créative et symbolique) font du livre un objet singulier et complexe, pris au cœur de réalités sociopolitiques. Pour appréhender au mieux une telle complexité, les pensées de l’écologie — et tous les concepts qu’elles véhiculent — s’avèrent être des outils d’une grande pertinence.

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NOTRE PERSPECTIVE

Les approches habituelles de la filière du livre sont sectorielles et ont tendance à appréhender la chaîne du livre maillon par maillon. Nous considérons que dans une période de bouleversements écologiques profonds (dont les répercussions sociales sont indéniables), il y a un enjeu fort à penser les interdépendances et les relations multiples que les choses entretiennent entre elles.

A ce titre, nous voyons en l’écologie — sciences des relations et des systèmes complexes — un outil puissant pour appréhender la chaîne du livre, non pas comme un simple secteur d’activité économique, mais comme un véritable écosystème.

— Rhizome de mousse lycophyte au microscope —